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Le camion qui répare les cœurs et les objets, également connu sous le nom de Repair Lab par la Croix-Rouge française


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    Progresser dans Montpellier et ses rues étroites du centre-ville, sans cesse en travaux, n’est pas chose aisée. Au volant du Repair Lab, Louise Brosset s’en sort comme une cheffe. Elle conduit pourtant un utilitaire Renault de 20 m3, aux allures de véhicule habituellement loué pour les déménagements. Mais le Repair Lab n’est pas un camion comme les autres. Mis en service fin juin 2023, il roule du côté de Montpellier ou encore de Lyon - avec l'équipe du dispositif d'intervention en Campements Informels (ICI) - pour permettre aux équipes Croix-Rouge d’aller à la rencontre de populations en situation d’exil présentes sur place. 

    Le Repair Lab est tout à la fois : un véhicule, un laboratoire, un café, un lieu dédié au bricolage… L’idée est simple : « Il s’agit d’un atelier mobile de réparation sur des lieux de vie informels, pour se réparer à travers l’objet » explique Louise Brosset, 29 ans, préfiguratrice du Repair Lab Humanitaire itinérant. « Le Repair Lab est né de plusieurs constats sur le terrain, partagés par les équipes qui interviennent en camps, squats, hébergements d’urgence, et les personnes que nous accompagnons qui y vivent, poursuit Louise, qui a rejoint la Croix-Rouge en septembre 2022. Le parcours d'exil est un parcours difficile, souvent déshumanisant et pendant lequel les rares effets personnels que les personnes emportent avec elles se retrouvent endommagés. A l’origine du Repair Lab, il y a donc l’idée de disposer d’un espace ressource, de répit, dans lequel chacun peut réparer des objets auxquels il tient, et en prendre soin. »

    Cette après-midi d’automne, le véhicule se gare à l’entrée d’un centre d’hébergement pour demandeurs d’asile situé sur la commune de Montpellier, à 45 minutes à pied de la place de la Comédie. Les personnes sont logées dans des baraquements en dur, blancs, collés les uns aux autres. Les hommes seuls d’un côté, les femmes et les familles de l’autre. Les logements sont minuscules, le terrain détrempé par la pluie de la veille au soir. Fiona frappe à chaque porte, attend quelques secondes, se dirige vers la suivante. Quand quelqu’un se manifeste, elle dit, en français ou en anglais : « Bonjour ! Si vous avez quoi que ce soit à réparer ou à recoudre par exemple, nous sommes une équipe de la Croix-Rouge française avec du matériel et un camion, garé juste à côté. Vous pouvez aussi juste venir pour discuter, boire un verre d’eau, un café ou un thé. »

    De nationalités australienne et britannique, cette ancienne pilote de ligne installée en famille à Montpellier œuvre comme volontaire depuis quelques mois. Elle vient ici chaque mercredi après-midi. « Je veux pouvoir donner de mon temps tout en améliorant mon français, sourit-elle. Vous savez, ça aide d’aider les autres. Les gens restent très seuls ici. Ça leur fait du bien de venir à nous. Ils ont certes souvent besoin de faire réparer quelque chose, mais ils ont aussi et surtout besoin de parler. »

    Rapidement, plusieurs hommes et femmes se présentent sous le auvent créé par l’ouverture de l’aile droite du camion. Certains apportent des jouets, un vélo, un jean ou un pull déchiré, un blouson dont le fermeture éclair ne fonctionne plus, des chaussures dont les semelles se décollent… Antoinette, 63 ans, est arrivée récemment de la République démocratique du Congo. Assise dans un fauteuil, visiblement fatiguée, elle montre le bracelet doré de sa montre, à laquelle elle tient beaucoup. « Il ne marche plus bien, ça ne se ferme plus. » C’est Christian qui se charge de la réparation. Cet autre bénévole est surnommé « MacGyver » du nom de ce héros de feuilleton des années 1980. Ancien « routard », comme il se définit, il ne cache pas avoir connu des années difficiles. « La Croix-Rouge m'a beaucoup aidé, la joie qu'ils m'ont donnée, je veux pouvoir la rendre. C'est très gratifiant, ces petits coups de pouce comptent beaucoup. J'aide des gens qui n'ont rien, et je donne ce que je peux. » 

    Le bracelet d’Antoinette est réparé en deux temps trois mouvements. Pendant ce temps, celle-ci n’est pas restée les bras croisés. Excellente couturière, « mais à la main, comme me l’ont appris les religieuses, pas à la machine », elle reprise ici un ourlet, là une chemise déchirée. « J’ai appris la couture à l'internat, puis je suis devenue professeure dans le Bas Congo. Ensuite, j’ai été vendeuse mais ça n’allait pas bien, ma santé n’est pas bonne. J'aime bien venir ici, ça permet de faire passer le temps, de parler, d'échanger. » Très méticuleuse, elle confie son rêve : s’occuper d’enfants dans une crèche ou comme nounou.

    Il y a de plus en plus de monde autour de la table mais aussi dans le camion, où Stéphane, autre bénévole, est en train d’apprendre à un jeune homme comment réparer sa valise à roulettes. La barrière de la langue est dépassée à l’aide d’applications de traduction dans le téléphone ou de vidéos, trouvées dans la bonne langue. Louise, elle, explique en anglais à un jeune Pakistanais comment réparer ses chaussures qui se décollent, « tu poses cette colle, tu laisses reposer pendant quinze minutes puis tu serres les deux parties pour que ça tienne. » Car telle est aussi la philosophie du Repair Lab : apprendre, transmettre, faire en sorte que les personnes sachent reproduire ce geste, le jour où elles en auront à nouveau besoin. « Cet espace ressource a également pour objectif de réduire le sentiment de dépendance qui existe parfois dans l'action sociale, insiste Louise. D'encourager une démarche de reconstruction par l'action. Participer au Repair Lab permet de se changer les idées, de rompre l'isolement que certains connaissent, d'écouter de la musique, de boire un café, de discuter, de se renseigner. On dit souvent que réparer, c'est aussi se réparer soi-même… »

    Aidés par d’autres personnes en exil et par nos bénévoles, deux jeunes hommes viennent de redonner vie à un petit ampli qui, connecté en Bluetooth, diffuse de la musique congolaise. Antoinette la reconnaît immédiatement : « Ça c’est typique du Congo Kinshasa, c’est Diamond Platinum et Koffi Olomidé ! » A l’intérieur du camion, où tous les outils sont parfaitement rangés, un homme, accompagné par Stéphane et Christian, prend soin de sa valise déchirée et dont les roues ne fonctionnent plus. Puis les deux bénévoles le laissent seul devant un ordinateur qui diffuse un tuto dans sa propre langue. « Tout le monde peut venir réparer ses affaires, reprend Louise. Très vite, de nombreuses personnes en situation de grande précarité, pas forcément exilées, sont également venues participer aux activités. Il était important de permettre la rencontre autour des objets réparés, ou parfois simplement protégés, améliorés, décorés. Un principe central, dans notre approche, c'est le faire-ensemble. »

    La jeune femme n’a pas oublié qu’au tout début de l’histoire, le Repair Lab a débuté à pied, avec un simple sac à dos de maraude. Puis à deux roues, avec une grande caisse rectangulaire, dont le couvercle sert de planche à travailler ou à découper, tirée par un vélo électrique. Les deux sont toujours utilisés, quand il s’agit d’aller à la rencontre de personnes vivant dans des endroits impossibles à atteindre avec le camion, sous des ponts par exemple. Histoire d’aider partout, et en toute circonstance. 

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    Author: Ms. Tiffany Bryant MD

    Last Updated: 1704037081

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